PREMIERE SEQUENCE (SUITE) :  PROXIMITE, LES POTENTIELS ET LES NOUVEAUX ACTEURS

FUP propose deux présentations tenues lors du FORUM à Namur. Elles mettent tous deux l’accent sur la proximité. Loin de disparaitre à l’occasion des transitions (pandémique, numérique, climatique), la proximité se réinvente. Toute société tend à maintenir et adapter les liens sociaux nécessaires aux individus. Pour autant ces liens seront-ils basés sur l’être solidaire ou bien sur l’être solitaire ? Quels sont alors les enjeux pour les territoires, et comment peuvent agir les collectivités ? Après Isabelle Baraud-Serfaty, voici une contribution qui porte sur les commerces de la nouvelle proximité.

JEAN-LUC CALONGER

Géographe de formation. Il est le Président fondateur de l’Association du Management de Centre-Ville de Belgique (AMCV), et conférencier. Ses qualifications couvrent le comportement des consommateurs et le développement territorial, ainsi qu’une expertise européenne en place branding, placemaking et place management. Chair of The Board of Directors TOCEMA WORLDWIDE International, think tank bringing together practitioners, onsite experience and worldwide know-how in town centre management.

Les nouveaux commerçants de centre-ville, une autre proximité !

Une nouvelle génération de commerçants a fait une apparition timide dans les centres-villes depuis plusieurs années. Proximité, qualité, engagement sociétal … ils ont su tirer profit de la transition digitale. Les mesures sanitaires liées au Covid 19 a mis en évidence leur résilience et très nettement favorisé leur développement. Premier impact inattendu : une diminution du nombre de cellules vides dans la grande majorité des centres urbains. Une première depuis 25 ans ! Qui sont-ils ? Comment soutenir et encourager leur développement en centre-ville ?

L’observation des noyaux commerciaux wallons a débuté il y a déjà des décennies. Après avoir pointé (pendant très longtemps) une désaffection des centres-villes et la fermeture de nombreux commerces, une nouvelle dynamique se manifeste. Quels sont les facteurs de cette tendance, et surtout qui en sont les acteurs ?

D’entrée de jeu, Jean-Luc Calonger relève un changement de ton dans le discours (et leur dénomination) des grands acteurs de l’immobilier commercial : ils se présentent moins en tant que gestionnaires de biens qu’en animateur de noyaux ou de concentrations de commerces. Autre indice de changement : les développeurs ne projettent plus de centres à usage unique, ils établissent ici aussi des projets à usage mixte (logements, équipements, commerces, loisirs, etc.)

Ce changement traduit-il la mutation observée dans les relevés de terrain ? Le recul des vacances commerciales est varié entre les villes wallonnes. L’enquête de terrain montre que la plupart gagnent en vitalité. Mais d’autres voient celles-ci continuer à augmenter : il s’agit des villes peu actives dans le soutien à leur tissu commercial, mais surtout les villes qui ont laissé s’implanter des grandes surfaces à proximité de leur centre (Waterloo, Wavre, Visée, Couvin, Beauraing, Saint-Vith). Du côté de Bruxelles, l’impact de la pandémie a été fort là où la clientèle touristique souvent internationale s’est raréfiée ; il a été moins fort là où la clientèle de proximité est restée présente (Bruxelles ne dispose pas d’un outil comparable).

Mais qui sont les nouveaux commerçants qui ont permis cette inversion de tendance ? Jean-Luc Calonger relève une série de cas exemplaires. Il s’agit souvent de commerçants nouveaux, qui disposent déjà d’une expérience professionnelle et de savoirs théoriques. Ils agissent de manière flexible, investissent en priorité les nouveaux outils numérique et en particulier les réseaux sociaux multiples, ; ils adoptent un mode de gestion flexible basé notamment sur les heures d’affluence qu’ils suscitent eux-mêmes au départ de leur communication. Dans ce contexte, étudier la vitalité des noyaux commerciaux nécessite de dresser des cartographies des réseaux sociaux : le numérique s’avère ici aussi une dimension nouvelle et importante de la proximité.

Sont-ils pour autant des adeptes du développement durable ? Ils disposent avant tout des business model bien affutés, qui prennent en compte les tendances de la consommation des ménages jeunes et aisés, les bobos. Ils fidélisent ainsi leur clientèle en promouvant les valeurs de ces derniers. Ils prennent également en compte la question des prix, qui doivent refléter ceux du mass-market : les plus bas possibles, car leurs clients même relativement aisés, sont souvent à la recherche de possibilités pour acheter davantage.

En définitive, la proximité se reflète d’abord à l’égard de la clientèle que ces nouveaux acteurs visent. Pour ce faire, leur communication ciblée permet de développer une connivence ou une relation sociale forte qui fidélise. Ces liens forts permettent alors de créer un tissu vivant et agile, qui s’ouvre aux nouvelles aspirations.